Les pépinières tout-terrain
Légères et mobiles, les pépinières sont des formes théâtrales brèves, conçues pour être jouées à l’air libre, dans l’espace public. Places, marchés, parcs, jardins : tout lieu de passage peut servir d’écrin à une performance théâtrale, à laquelle les spectateurs auront été conviés comme à un rendez-vous.
En solo, duo ou trio, chaque artiste livre une petite performance de 20 à 30 minutes, dans laquelle sont abordées avec humour et vulnérabilité des problématiques qui lui tiennent à cœur. Chaque prise de parole offre une déambulation dans un univers différent : sur le mode absurde, comique, grinçant ou onirique, les pépinières viennent questionner nos angoisses face aux bouleversements de l’existence, faire l’éloge de la sororité, interroger notre rapport à l’autorité politique et à la liberté d’expression, ou enfin célébrer une forme d’espoir et de résilience face aux crises de notre siècle.
Neuf vies
Par Yvan Richardet
Plusieurs études scientifiques accusent le chat domestique d’être une catastrophe écologique. Nos félins chéris mangeraient trop d’oiseaux et auraient un lourd impact sur la biodiversité. Pour présenter son point de vue sur le sujet, un chat, à l’affût de sa prochaine croquette, accueille les spectateurs dans sa cuisine. Ses neuf vies ne seront pas de trop pour rendre son verdict aiguisé… qui égratigne un peu l’humain.
Dans une cuisine agencée avec du carrelage blanc, un distributeur automatique de croquettes et un bac à litière compostable dans un coin, le Chat d’Yvan Richardet livre en alexandrins le futur qui attend l’humanité.
L’O…céans
Par Thierry Crozat
C’est l’histoire d’un fou qui veut prendre un bain. Une baignoire trône au centre d’une salle d’eau. Le fou a les pieds noirs et a peur de salir l’eau du bain. Elle est si belle et si pure… Vus depuis la terre, les paysages marins sont toujours splendides, surtout quand le soleil se couche. Au fond de cette baignoire se trouve le continent des grands mammifères marins, des squales, du plancton, du krill, du corail et de multiples espèces encore inconnues.
Mais il suffit de mettre la tête sous l’eau pour que tout bascule : l’O commence à manquer d’air… Tiens, du plastique ? L’or bleu est essentiel à l’avenir de la planète et à la survie de l’espèce humaine. Dans cette salle de bain, on peut chanter à tue-tête, certes, mais aussi questionner notre rapport à l’eau, à nos origines biologiques, à notre nature ancienne et profonde. Cette eau dont nous sommes faits ; l’O dedans et l’O de là.
Et il faudrait arrêter de boire et manger du plastique. Planète ou plastique, il faut choisir. Les océans constituent l’enjeu majeur de la crise climatique. Dans « L’O…céans », le personnage du Fou de Thierry Crozat en appelle au rêve et surtout à la réalité de demain.
Les boîtes aux lettres
Par Thierry Crozat
Thierry Crozat revient cette fois sous les traits d’un concierge étrange et décalé, gardien des boîtes aux lettres de toute l’humanité.
Le public est convié à un voyage dans cet autre monde, intime et caché, auquel donne accès une boîte aux lettres. Trait d’union entre le moi et l’autre, la lettre renoue avec le temps du voyage et de la distance, à l’heure de l’immédiateté du clic and go. Elle matérialise l’attente, la patience, le mûrissement.
En déployant sa fable onirique, le Gardien des boîtes aux lettres nous rend sensibles à la poésie du minuscule, et nous pousse à ralentir nos rythmes de vie pour réhabiliter dans notre quotidien cet émerveillement naïf pour les petites choses, qui est l’apanage des simples d’esprit.
Lecture intime
Par Laurent Annoni
Dans un univers parallèle librement inspiré de Fahrenheit 451, les livres sont bannis et les consulter constitue un crime pénalement et moralement répréhensible. Or, une société parallèle résiste à cette interdiction : celle des Gardiens qui dissimulent des livres.
Souvent fous, perpétuellement terrifiés à l’idée d’être découverts, ces anonymes développent une relation étrange aux ouvrages sur lesquels ils veillent. Jouant avec une bibliothèque verticale envahie de livres, Laurent Annoni se livre à une performance burlesque et acrobatique, qui traduit en gestes l’émotion que ressent un lecteur qui s’abandonne, envers et contre tout, au pouvoir du livre.
Superflu et sage
Par Laurent Annoni et Mehdi Duman
Toujours inspiré par Fahrenheit 451, mais également par les univers claustrophobiques de Huis Clos et 1984, Laurent Annoni poursuit sa réflexion sur les contraintes imposées à la pensée humaine, dans une société qui aurait banni les livres pour leur caractère dissident et obligerait chacun à se voir constamment à travers les yeux d’autrui. Et si nous ne pouvions plus jamais nous laisser aller à être nous-mêmes en présence des autres ?
Secondé du comédien et danseur Mehdi Duman, Laurent Annoni devient un Pompier pyromane, brûleur de livres au service des forces de l’ordre, simple exécutant à qui est interdite toute émotion ou sensibilité. À l’aide d’un jeu grinçant et loufoque, le duo explore ici une dramaturgie du contrôle de soi, en incarnant deux figures prisonnières du regard de l’autre, et du besoin constant de lui dissimuler sa fragilité.
Clair-obscur
Par Chantal Bianchi
Avec des textes courts et poétiques, sous la forme d’un voyage vocal, Chantal Bianchi campe le personnage de la Vieille, qui se détache sur un fond de ciel imaginaire. Avec sa basse électrique et son looper, sous le regard médusé de son valet Charlie qui veille sur elle, la voilà qui sort sur le pas de la porte pour donner un concert, invitant le public à la suivre dans son univers musical, peuplé de compositions originales, entre slam et boucles vocales psalmodiées.
En hommage à des figures féminines marquantes qui ont jalonné le parcours de sa vie, Chantal Bianchi convoque un instant entre clair et obscur, pour prêter une voix à ses sœurs oubliées, femmes artistes, sorcières ou femmes à scandale…
Pas de porte
Par Eva Gattobigio, Matthieu Juilland et Matthieu Wenger
Quelque part entre ici et là-bas, trois personnages coulent des jours paisibles. Dans leur vie bien rangée, une porte s’ouvre soudain : doivent-ils en franchir le seuil, sans savoir ce qui les attend de l’autre côté ?
Avec tendresse et bouffonnerie, le trio de jeunes comédiens s’attache ici à explorer les instants de vie qui précèdent les chamboulements majeurs. En s’inspirant de l’univers cinématographique de la comédie italienne, de Fellini à Benigni, la performance esquisse en filigrane un rapproche¬ment avec les enjeux de notre siècle : à l’heure des grands bouleversements, comment appréhende-t-on le changement ?
Le petit salon de médiation culturelle
En marge des spectacles, la médiatrice culturelle des arTpenteurs, Corinne Galland, propose des animations ludiques sous son chapiteau blanc. Léger et mobile, le petit salon permet d’ouvrir un dialogue joyeux avec les performances théâtrales de la troupe, et s’adapte à tous les environnements.
Dans un décor forain et accueillant, le public est invité à découvrir l’univers du théâtre itinérant. Passant de spectateur à comédien, il aura l’occasion par exemple de jouer une saynète du répertoire théâtral, chanter une chanson, lire un conte, ou encore raconter un rêve à partir d’une image.